vendredi 30 août 2019

Santa Cruz del Islote : La Colombie surpeuplée



Résumé de la vidéo


Il s'agit d'un ilot de l'archipel de San Bernardo , plus d'un hectare à 20 km des côtes colombiennes peuplé de 450 membres de familles de pêcheurs descendant d'esclaves africains réfugiés après l'abolition au XIX ème siècle. Sans administration légale, ni espaces publics , il n'est pas rare que plusieurs familles s'entassent chez un patriarche.  La solution de batir en hauteur reste hors de portée de leur bourse. Raphael et la famille de sa soeur cohabitent chez leur père tandis que sa fiancée, Henerina, vit sur le continent à Berugas mais il ne peut lui offrir le voyage en canot qu'une fois par même si elle n'a pas tous les jours à manger. A Berugas le chômage s'avère endémique et la région sous la coupe d'un violent cartel de la drogue.

L'électricité solaire et le réseau téléphonique arrivent dans les maisons mais pas l'eau potable ni l'égout. L'île n'est à l'origine qu'un banc de sable délaissé et abondé en coraux , coquillages et béton par les pêcheurs obligés de rabibocher en permanence les dommages de l'érosion par les vagues.

Les îles avoisinantes s'avèrent quasiment inhabitables à causes des moustiques peuplant les mangroves dont Santa Cruz se libère par manque d'eau douce,

Les pêcheurs capturent entre 200 et 300 kg de coquillages, crustacés et poissons quotidiennement vendus pour la plupart aux restaurants des environs.

 Un pêcheur gagne en moyenne 20.000 pesos soit 7 euros par jour. le prix d'un aller retour en canot sur la côte.

La mer reste un mystère , on ne pêche rien pendant une semaine puis il suffit de râcler le fond pour remplir sa barque, annonce Raphael. La pêche commerciale interdite dans l'archipel depuis 20 ans , Raphael doit pagayer des heures pour sortir de la zone protégée et se mettre hors de portée de la marine colombienne. Il pratique la pêche sous-marine au harpon apprise de son père , en apnée jusqu'à 20 mètres de fond , adoptée depuis des siècles dans la région. Cependant la raréfaction des ressources l'amène à s'éloigner chaque fois davantage pour remplir son escarcelle. Avant, une heure de pêche suffisait mais aujourd'hui c'est toute la journée. Plusieurs pêcheurs ont cessé l'activité faute de rendement , trop de pêcheurs dans la région compromettent l'avenir  de ce métier, les aides de l'état restent rares et longues à parvenir. En fin de journée , 60 plongées de Raphael lui ont rapporté cinq poissons.

Tous les 20 jours des marchands livrent des denrées aux épiceries de l'île. L'épicière Suzana Castillo de Rios habite une des plus riches maisons, elle a commencé avec un étal puis elle a pu renoncer à la pêche. On mange davantage de viande car il y a moins de poisson. L'eau douce est rationnée , 4 litre d'eau de pluie traitée coûte 3000 pesos Une famille a droit à 25 litres par semaine , les insulaires complètent leurs besoin en l'achetant par sachet. Les fruits et légumes y coûtent aussi cher que la viande.

Certains pêcheurs comme Alberto le cousin de Suzana bricolent des compresseurs pour s'aventurer dans les fonds et des accidents de pallier surviennent , paralysant leurs membres inérieurs par des bulles d'azotes dilatées subitement dans leur tissus. Alberto , pour nourrir ses 7 enfants , a pris le risque de trop et sans soins médicaux il restera paralysé. Un médecin se rend sur l'île une semaine par mois, un infirmier pare au plus pressé et les soins aux 225 enfants sont gratuits.  L'infirmier tente de sensibiliser les femmes aux moyens de contraception car le taux d'accroissement de la population s'élève à 1 % soit double en 70 ans. Une règle tacite stipule qu'il est impossible de marier deux ilotes portant le même nom quand bien , même cela ne signifierait pas consanguinité, les ilotes doivent alors trouver leur compagnon ailleurs.

La solidarité sur l'île est de mise, on veille aux relations de bon voisinage. Les travaux communautaires se distribuent aléatoirement, ainsi Rosa nettoie la croix bleue de l'église sur la place du marché. Il y a une école jusqu'à la troisième ensuite les enfants aident leur parents, une éducation plus approfondie leur manque pour trouver un travail sur le continent. Certaines femmes comme Rozenda préfèrent travailler afin de ne pas dépendre de leur mari. Elle tient un restaurant sur l'île voisine adoptée comme station balnéaire par les habitants côtiers, elle pré-achète aux pêcheurs le poisson servi à ses clients et emploie des ilotes dans son établissement. La direction du tourisme régional encourage la construction d'hotels tout en interdisant la pêche commerciale, ce qui stimule le braconnage.

Le tourisme est le seul secteur offrant des emplois aux femmes, jusqu'ici c'était la pêche.

Avant l'essor du tourisme les ilotes pratiquaient le troc mais aujourd'hui ils comptent sur l'argent exclusivement.

Partis à la pêche aux langoustes , Raphael et son père Ricardo, tombent sur un site bien pourvu , après avoir chargé leur barque ils rejettent à la mer les femelles portant des oeufs comme l'oblige la loi. Ricardo pense qu'il va devoir changer de travail en attendant que le site se repeuple car depuis leur barque , la zone de pêche s'avère réduite. Plusieurs se sont installé à Cartagène pour travailler en usine ou construction.

Les ilotes sont enterrés sur une île voisine dans un cimetierre où travaille un gardien dont le grand-père lui racontait des histoires de l'esclavage. Il raconte que la discrimination existe toujours , ainsi un jour des blancs vinrent au cimetière , ils mirent des gants pour lui serrer la main.

Les ilotes de l'île de Santa Cruz sont propriétaires de l'île. Ils en prennent soin et la protègent. La famille de Raphael possède dans le cimetierre un caveau familial où reposent ses ascendants îlotes.

Hénérina tisse des tresses sur la plage pour gagner sa vie et ne pourrait subvenir à tout ses besoin sans l'aide financière de son fiancé,

Sur l'île Le divertissement de fin de semaine consiste à déguster de la soupe de poisson en écoutant de la musique. Raphael décide de partir à Cartagène afin de travailler en usine pour gagner de quoi construire un deuxième étage sur la maison familiale.

Commentaire


Une communauté soudée , fondée sur l'histoire et l'ethnie d'origine africaine , fonctionnant partiellement en autogestion et bénéficiant de services publics à minima avec accès aux aménités propres à l'économie de marché . Une communauté menacée de surpeuplement , insoutenable de manière flagrante au point de mettre en danger l'écosystème dont elle dépend.

Le contexte politique violent et anarchique du pays depuis 70 ans a épargné l'île même s'il ne s'éloigne jamais loin comme on le voit à Berugas . Ni drogue ni délinquance qui la détruirait en un clin d'oeuil et fait son charme. En Colombie les trafics illicites en tout genres irriguent l'économie en exarcerbant les tensions déjà historiquement fortes.  On a moins droit à l'erreur en situation de violence endémique mais quand le peuple en echappe il se voit rattrapé par sa démographie.

 

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